Caractérisation moléculaire de la matière organique dissoute dans les rivières arctiques : biomarqueurs spécifiques du paysage
Contexte
Le changement climatique est une des modifications majeures de l’environnement reliées à l’ère industrielle. Le réchauffement global n’est pas uniforme et les modèles globaux du climat prédisent un réchauffement futur relativement plus important dans les hautes latitudes. Jusqu’à présent, ces environnements étaient largement moins étudiés que ceux situés à des latitudes plus basses. La plupart des rivières arctiques drainent de vastes zones de pergélisol continu ou discontinu. La partie supérieure de ces sols, particulièrement riche en carbone organique, fond chaque année pendant la période estivale. Cette couche active joue un rôle déterminant dans ces régions car l’essentiel des processus écologique, hydrologique, biogéochimique et pédogénétique y prennent place Avec les prévisions d’augmentation des températures, la superficie de pergélisol diminue et l’épaisseur de la couche active augmente. La combinaison de ces deux processus, conséquences du changement climatique, va grandement modifier les cycles biogéochimiques dans ces régions, notamment celui du carbone organique. En effet, ces processus vont conduire à une libération importante des flux de carbone organique des sols et des tourbières et à une augmentation de leurs transferts vers les écosystèmes aquatiques. L’augmentation des concentrations de carbone organique dissous (COD) est particulièrement bien documentée dans ces régions mais très peu d’études ont été menées sur la source (sols forestiers, tourbières, sols agricoles) et la qualité (nature et état de dégradation) de ce COD. Pourtant, au-delà des quantités de carbone organique exportées dans les rivières et les fleuves vers l’Océan Arctique, il est crucial de déterminer la composition et la qualité de ce flux supplémentaire de matière organique. En effet, si la plupart du carbone organique transféré vers l’Océan Arctique est labile et dégradable (disponible pour la dégradation biologique), son évolution peut modifier considérablement les cycles biogéochimiques des éléments. Il constituerait d’une part une rétroaction positive au changement climatique avec une émission accrue de CO2 et de CH4 mais également, il participerait au transfert préférentiel des éléments métalliques qui se sont accumulés dans les écosystèmes arctiques depuis le début de l’ère industrielle.
Le projet de master s’insère dans le cadre du projet européen TOMCAR-Permafrost (Terrestrial organic matter characterization in Arctic River through molecular and isotopic analyses, FP7-PEOPLE-2010-RG), qui porte sur l’analyse moléculaire et isotopique de la matière organique dissoute des fleuves arctiques. Ce projet participe à la dynamique de recherche du groupements de recherche international CAR-WET-SIB II et est inclus dans la thématique Climat, Biosphère, Environnement du Centre Franco-Sibérien de recherche et formation (CFS).
Cadre spécifique et objectif
L’analyse de nombreux marqueurs moléculaires (lipides, polyphénols, sucres) et isotopiques de la matière organique est développée depuis plusieurs années dans les matrices environnementales solides (sols, tourbières, sédiments) et depuis quelques années dans la fraction particulaire de la colonne d’eau. Les analyses moléculaires sur la fraction dissoute sont plus rares et sont limitées aux molécules les plus résistantes à la dégradation et en quantité importante (e g phénols dérivés de la lignine). Nous possédons donc actuellement une vision partielle de la composition de cette matière organique dissoute dans les rivières arctiques alors qu’elle représente entre 80 à 90% du carbone organique de la colonne d’eau et que cette composition peut influencer à la fois le cycle global du carbone et le devenir des contaminants dans l’environnement.
Dans le cadre du projet TOMCAR-Permafrost, le projet de master a pour objectif de réaliser une recherche prospective de marqueurs moléculaires spécifiques dérivés de la dégradation de la lignine et des cortèges moléculaires lipidiques potentiellement marqueurs de tourbières qui représentent une part conséquente des bassins versants arctiques (jusqu’à 30%). Cela permettra d’amener une plus grande connaissance des sources et de la qualité de la matière organique dissoute exportée par les fleuves arctiques.
Compétences requises
Niveau Master 2 en Biogéochimie, Géochimie organique, Chimie analytique ou tout autre domaine relevant de l’environnement et de l’Hydrochimie.
Expérience ou forte motivation pour les analyses en laboratoire.
Bonne aptitude de terrain requise.
Durée et lieu du stage
6 mois à partir de Janvier 2015
Laboratoire d’Écologie Fonctionnelle et Environnement (EcoLab), campus ENSAT à Auzeville-Tolosane. Déplacement et court séjour à prévoir à l’IC2MP (Institut de Chimie des Milieux et Matériaux de Poitiers) ainsi que sur le terrain.
Encadrement
Roman Teisserenc, EcoLab, roman.teisserenc@ensat.fr
Laurent Grasset, IC2MP, laurent.grasset@univ-poitiers.fr